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La muse de M. Saint Laurent

M. Saint Laurent's Muse

Kirat Young

Kirat Young a pris d'assaut le monde de la mode en 1976 lorsqu'elle apparaît dans la collection dite « Opéra – Ballets russes » d'Yves Saint Laurent. À seulement 19 ans, la nouvelle venue aux cheveux corbeau, née à New Delhi, est devenue l'égérie du couturier français et a rapidement défilé sur les podiums de Chanel, Valentino et Versace. Ici, elle se confie à Re-SEE sur son travail aux côtés de M. Saint Laurent et des vêtements emblématiques qu’elle a portés tout au long de sa carrière de mannequin qui dura treize ans.

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« Je suis entrée dans le mannequinat par pur hasard. J'’étais en école de mode à Londres et j’étais en vacances à Paris. Je venais de rentrer de Grèce, j'avais de longs cheveux noirs et j'étais bronzée. Je portais des vêtements assez cool. J'ai rencontré un journaliste lors d'une soirée qui m'a dit : « Tu devrais être mannequin ». Elle a voulu m'envoyer voir Yves Saint Laurent. Bien sûr, étant étudiante en mode, je savais qui était Yves Saint Laurent. Pendant mes études, j'avais même dépensé une partie de ma bourse pour acheter une paire de bottes Saint Laurent en soldes. Je n'avais jamais été mannequin avant, alors je me suis juste présentée à la Maison de couture,  ils m'ont donné des vêtements et m'ont envoyée le voir. Mon ambition, cétait simplement de le voir en vrai et de le dire à tous mes amis. Alors je suis entrée et je me suis postée devant son bureau. J'ai dit « Bonjour » et il a dit « Bonjour ». Normalement, quand tu fais un go-see, tu n'es pas censée dire quoi que ce soit… Il a commencé à me parler et à me poser des questions. Il a dit qu'il aimait l'Inde (d'où je venais) et s'est levé de derrière son bureau pour me raccompagner jusqu'à la porte du studio.

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Tout était une question de timing. Avant cela, il faisait les smokings, et là il préparait la célèbre collection des Ballets russes, qui était très différente de tout ce que tout le monde avait fait auparavant. Le journaliste avait pensé à moi parce que j'étais exotique et qu'il n'y avait pas beaucoup de modèles exotiques. Les seules autres filles exotiques étaient Marie Helvin, qui était la femme de David Bailey, et Donna Palmer. Ils m'ont fait porter cette robe de soirée très chic et quand je suis sortie, il a juste dit: « Oh, mademoiselle ! » On a échangé quelques mots, mais il était plutôt timide. Loulou de la Falaise était aussi là, dans le studio. Ils ont dit : « C’est bon pour nous, pouvez-vous commencer demain ? » Ils ne m'ont même pas demandé si j'avais été mannequin avant ou quelque chose comme ça. Juste il m’aimait bien et je lui semblais bien pour la collection des Ballets russes. J'ai dit : « Ok, pourquoi pas ? »

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Pour la haute couture, les essayages se déroulaient mi-juin et la collection sortait fin juillet. Le contrat avait une durée de six mois, période pendant laquelle vous montriez les vêtements de la Maison de couture deux ou trois fois par semaine. Pendant les essayages, nous étions dans le studio et pouvions voir les beaux tissus et les accessoires etc. Je me disais : « Ces gars-là me paient pour porter tout ça… Ils doivent être fous ! » Nous étions environ six filles dans la cabine. J'avais été dans un internat en Inde, c'était donc le même genre d'ambiance. On passait notre temps ensemble et on s’asseyait pour discuter. Lorsque la collection est sortie, elle a été copiée par tout le monde dans le monde entier. C'est l'une des collections les plus importantes qu'il ait jamais faites et elle a vraiment eu un impact énorme sur la mode. J'en ai été la vedette malgré moi. Comme je portais les plus belles silhouettes, j'ai été photographiée pour le Vogue américain pendant la nuit, quand tous les magazines faisaient leur shooting.

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Je suis rentrée de vacances en septembre et quand tous les magazines sont sortis et je me voyais partout. Grâce à ça, j'ai fait beaucoup de campagnes pour Saint Laurent avec Helmut Newton… Je ne savais même pas qui était Helmut ! Après ça, tous les autres créateurs se préparaient à faire du Prêt-à-Porter en octobre, et ils appelaient la Maison de couture Saint Laurent pour me demander de faire partie de leurs collections. Je n'avais pas d'agent ou quoi que ce soit. Le pauvre bureau de presse prenait des appels pour moi et transmettait des messages ! J'étais rattachée à la Maison, mais ils étaient tellement gentils qu’ils me laissaient travailler pour tout le monde. Yves [Saint Laurent] m'aimait beaucoup. J'ai été son inspiration et sa muse pour de nombreuses collections. Les deux premières saisons, je travaillais là-bas à plein temps, mais ils m'ont laissée faire d'autres collections et tout ce que je voulais. Ils avaient même des remplaçants pour moi pour les défilés de mode pour les clients. Si je disais que je partais pour Rome, ils trouvaient quelqu'un d'autre pour le faire. Mais j'ai toujours fait les essayages pour la Couture parce que c’était super important pour moi d’apprendre. C'était un travail très dur parce que pendant un mois on travaillait non-stop. Mais j'ai fait ça jusqu'au bout parce qu'il me voulait absolument. Nous nous sommes mis d’accord sur notre collaboration, qui était assez inhabituelle. J'ai travaillé avec lui pendant treize ans.

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Un jour en janvier au début des années 80, je revenais d'Inde où j'allais tous les Noëls, j'étais dans mon humeur indienne et j'avais des bracelets de cheville… Habituellement, lorsque vous arrivez pour l'essayage, vous portez des bas noirs transparents, mais j'avais juste gardé mon bracelet de cheville. Je ne l’avais pas retiré ! Yves l'a tellement aimé qu'il l'a intégré à sa collection. Loulou a fait ces bracelets de cheville en strass, que je portais avec toutes les robes courtes. À l'époque, vous portiez des choses simples, comme un blazer et un pantalon la journée, et le soir des jupes ou, plus tard, des pièces de la collection Les Espagnoles, qui était totalement mon style.

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Je travaillais aussi avec tous les créateurs en Italie et j'ai fait toutes les collections pour Armani, Versace, tout le sérail, alors j'ai reçu des vêtements. Et puis bien sûr je suis venue à New York, et j'ai rencontré Oscar (de la Renta). À cette moment-là, j’étais dans une agence. Je suis allée pour un go-see, mais ce n'était pas un go-see. Il a dit:  « J'avais tellement hâte de vous rencontrer. »  Nous sommes devenus très bons amis et j'ai beaucoup travaillé avec lui. Je suis allée en vacances chez lui en République Dominicaine. J'ai travaillé avec tous les créateurs américains : Bill Blass, Geoffrey Beene et quelques-uns plus jeunes... Je viens de trouver une robe du début des années 80 de Cathy Hardwick. C'est elle notamment qui a découvert Tom Ford.

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J'avais énormément d’incroyables pièces Saint Laurent parce que j’ai eu la chance de défiler pour la Couture et on nous offrait deux tenues chaque saison, mais j'en ai gardé très peu. J'ai vécu partout dans le monde et je n'avais tout simplement pas la place. Que voulez-vous ? J'ai donné beaucoup de vêtements au Powerhouse Museum en Australie [où je vivais à l'époque]. En revanche, j'ai toujours les Smoking (vestes), que je laisse ouvertes et que je porte avec un haut blanc ou quelque chose en dentelle. J'ai aussi ce haut rouge à pois noirs d’autrefois. Cette fois-ci, quand j'ai vidé mes placards pour faire à nouveau de la place, j'ai donné quelques pièces à Re-SEE. Il y a un manteau kaki matelassé de la collection Ballets Russes; cet ensemble pantalon et veste en velours très mignon qui a un style masculin de la collection Les Espagnoles ; et un costume à fines rayures que je portais dans une publicité tournée par Helmut pour Rive Gauche. Maintenant que j'y pense, j'aurais dû le garder ! »
 

mots confiés à Zoé Ruffner

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Image d'une femme avec des sacs à main

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